La fratrie et ses conflits

L’arrivée du deuxième (ou plus…) amène souvent plein de questions sur nos relations à l’enfant : vais-je réussir à aimer ce nouvel enfant autant que le premier ? Est-ce que cela ne fera pas de tort à l’aîné ? Selon notre place dans notre propre fratrie les angoisses sont différentes…

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L’arrivée d’un nouvel enfant dans la famille est, certes, un chamboulement pour tout le monde et il faut se laisser le temps, à tous, de trouver ses marques dans ce nouvel ordre familial. Laisser aussi le temps aux enfants de s’apprivoiser entre eux, sans bousculer leurs rapports. Bien sûr, on aimerait qu’ils s’adorent d’emblée, mais, comme il nous faut parfois du temps pour apprivoiser notre enfant, il leur faut parfois du temps pour s’apprivoiser entre eux, et trouver le juste ton. Notre fille aînée était très fière d’avoir un petit frère, mais elle a été aussi très agressive envers lui : morsure, tapes. On ne peut pas laisser le bébé se faire mordre ou taper, mais ses gestes sont bien souvent un appel de l’enfant pour exprimer un besoin, un sentiment. Comme beaucoup d’être humains (hélas), l’enfant se défoule parfois sur un plus petit, plus faible que lui. L’écoute de l’aîné est primordiale, il nous faut écouter ses émotions, les positive comme les négatives. Un enfant a le droit de ne pas aimer son petit frère/petite sœur, et le droit de nous le dire. Il n’empêche en rien qu’il va devoir accepter de vivre avec ! Et pour apprendre à vivre avec, il faut encore pouvoir s’en approcher…

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Il est tentant d’écarter un « grand » encore bien jeune du nouveau-né. Pourtant, les premiers contacts, les premières rencontres sont importantes. Une fratrie qui se construit, c’est dès la naissance de l’enfant. Combien de rapports conflictuels entre frères et sœurs prennent leur source à la naissance du cadet, lorsque l’aîné était envoyé dans la famille quelques temps. Cela ne se fait plus beaucoup, mais on voit encore beaucoup de parents, effrayés des gestes brutaux que peuvent avoir les enfants encore jeunes, empêcher le contact avec le nouveau-né. J’ai toujours eu beaucoup de mal à comprendre que des gens pas si proches de nous demandent à prendre mon nouveau-né dans leur bras ; en revanche, ma fille a pris son frère sur ses genoux très vite. Pas seule, bien sûr (elle n’avait pas deux ans…), mais c’était l’occasion d’un câlin ensemble…

Lorsque les enfants grandissent, il devient plus facile de les laisser entre eux sans intervenir, quand le petit sait bouger, se déplacer, quand les rapports s’équilibrent. Les voir jouer ensemble est tellement agréable ! Il y a bien évidemment des conflits qui éclatent, la fratrie est un très bon moyen d’apprendre les relations aux autres ! Laissons-les au maximum se débrouiller entre eux, sans intervenir (tant que l’un n’est pas clairement en position difficile ou dangereuse !!). C’est pour eux le meilleur moyen d’apprendre, de découvrir les limites de l’autre. D’ailleurs, on constate souvent que lorsque l’on intervient, on prend position, on décide pour eux de l’issue du conflit, on les en dépossède. Du coup, la solution leur est rarement satisfaisante, et pour peu que l’on ait mal compris le conflit, les enfants font front commun devant cet intrus qui vient leur dire comment faire ! On peut en revanche servir de médiateur si le conflit s’enlise, et proposer de chercher avec eux (et non à leur place), des solutions…

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En observant mes enfants, je me suis rendue compte que nombre de leurs conflits prenaient source dans nos comportements. Lorsque j’ai été plus nerveuse, plus exigeante avec mes enfants, que je leur ai parlé de façon plus autoritaire, le ton monte bien plus vite entre eux, et j’entends dans la bouche de ma fille les mots que je lui ai dits, le ton que j’ai employé. Mon fils devient moins patient avec elle. A l’inverse, lorsque j’ai pris le temps d’exprimer calmement mes besoins et d’écouter les leurs, je les vois s’entraider, la grande racontant des histoires à son petit frère, ou lui demandant d’un ton calme de bien vouloir la laisser jouer tranquille, qu’elle veut être seule ! Et son petit frère être ravi de lui rendre mille services… Quelle motivation pour moi !
Un point qui me semble primordial (et pourtant parfois si difficile à respecter…) : ne jamais comparer les enfants entre eux !!! Ce serait les mettre dans une situation de compétition… et donc de conflit potentiel !! C’est aussi comparer l’amour que l’on peut leur porter et créer ainsi des situations de jalousie. Lorsqu’il arrive de vanter les mérites d’un enfant en dénigrant l’autre (du style « tiens, le petit est déjà propre, alors qu’avec la grande, c’est pas encore ça »), l’effet est immédiat : la jalousie arrive…

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Il est illusoire de vouloir « aimer pareil » ou « élever pareil » ses enfants. Chaque enfant a son histoire propre, sa place dans la fratrie. Son arrivée dans la famille correspond à un moment précis de notre histoire… car nous aussi nous évoluons ! Il est donc important, plus que de chercher l’équité entre frères et sœurs, de traiter chacun de façon particulière. Chacun est un être à part, différent des autres, et nous devons traiter chaque enfant de façon unique et particulière… je n’aime pas mon fils et ma fille de la même façon. Je n’ai pas du tout les mêmes rapports avec l’un qu’avec l’autre. Avec ma fille, je suis dans la parole, l’échange. Avec mon fils, c’est du physique, plus primaire.  Ils n’ont pas les mêmes besoins. De même ils n’attendent pas de leur père qu’il se comporte comme moi… et ils ne se comportent pas pareil avec lui ou avec moi ! Je sais pourtant bien qu’ils nous aiment très forts tous les deux. C’est pareil dans notre sens. Et si les valeurs que nous défendons et les grandes lignes de ce que nous voulons leur transmettre restent les mêmes, les apprentissages et les rythmes sont différents.

Pauline