Scolariser ou non

Notre expérience de l’instruction en famille

D’abord, Aux 3 ans de notre fils (en juin) s’est posé la question que tout le monde pose : « et alors il va à l’école à la rentrée ce petit bonhomme? » La question que tout le monde pose mais que personne ne se pose car c’est finalement un lieu commun, une banalité, une norme on va à l’école à 3 ans. En tout les cas et quel que soient les choix individuels, la question mérite de se poser vraiment en fonction de l’enfant, des parents, et de l’équilibre familial.

La question s’est donc posé pour nous: en terme d’idéaux, pour que notre enfant ne soit pas obligé de suivre un rythme imposé pour la satisfaction de ses besoins primaires (manger, dormir, aller aux toilettes, se déplacer, parler…), pour que notre enfant ait accès aux savoirs qui l’intéressent et non pas aux savoirs à acquérir à son âge, pour qu’il puisse apprendre en étant acteur par la manipulation et non pas de façon passive et uniquement par le support graphique… nous souhaitions pouvoir pratiquer l’instruction en famille.

La réalité nous a assez vite rattrapé: nous, ses parents travaillons tous les deux, pas tout à fait à plein temps, mais assez pour passer plusieurs heures par semaine sans nos enfants. Le choix qui nous semblait le meilleur était donc de façon pragmatique assez difficile sans changements de vie assez radicaux (arrêter de travailler pour moi, changer de maison …) . Nous avons donc cherché des école alternatives, voire à en monter une… ce qui s’avère là aussi très compliqué dans une zone rurale.

Et pendant ce temps j’ai lu beaucoup sur internet, quelques livres, rencontré des parents qui avaient fait le choix de déscolariser. Et finalement « c’est pas parce qu’il ne va pas à l’école à 3ans qu’il n’aura pas son bac » m’a fait remarqué mon médecin de famille!! Un peu moins inquiète, j’ai convaincu mon compagnon que cela serait possible! Nous nous sommes donc lancés dans l’aventure de l’instruction en famille 7 demi journées par semaine, 2 assurées par papa et 5 par moi-même. Le reste du temps, ils sont gardés par une nounou ou une amie.

Une fois ce choix fait reste à savoir comment « occuper » ce temps dédié aux apprentissages au sens large. Nous avons énormément tatonné et à peu près tout essayé, c’est l’avantage de commencer tôt, on a moins de pression par rapport au « résultat » à obtenir. Finalement nous avons opté pour une approche « semi-directive » pourrait-on dire: je propose à mon fils une boite contenant toutes sortes d’activités à partir de ce qu’il aime, ce qui semble utile de connaître (les couleurs par exemple!), ce qui est possible, inspiré de diverses pédagogies… et il choisit parmi toutes ces activités proposées ce qui lui plait, je choisis aussi quelques activités afin d’essayer de lui ouvrir d’autres horizons, de lui faire découvrir des choses vers lesquels il n’irait pas de lui même, on voit ensuite ensemble si cela l’intéresse ou pas. Avec son papa, il fait des activités « pratiques » comme de la cuisine ou du jardinage, ils discutent aussi beaucoup, alors que j’ai plutôt tendance à privilégier le support image.

Chez la nounou c’est parfois compliqué pour notre fils d’être avec des petits. Mais nous discutons beaucoup avec la nounou pour que notre fils puisse manger avec les plus grands qui rentrent de l’école, avoir les même droits qu’eux, qu’il puisse emmener des jeux qui lui plaisent etc… ce n’est pas toujours facile surtout que son petit gabarit fait parfois oublier son âge!

Cet équilibre nous correspond plutôt bien pour l’instant mais on le remet en cause régulièrement pour voir ce qui peut être amélioré pour que chacun y trouve son compte. Nous ne souhaitons pas suivre de « méthode » toute faite, mais plutôt y piocher ce qui nous correspond.

Après quasi une année scolaire nous sommes assez satisfaits de l’équilibre trouvé et en terme de temps cela semble bien suffisant pour que notre loulou fasse les acquisitions nécessaires… c’est vrai il ne dessine pas encore de bonhomme et nous n’avons pas prévu de faire de fiches pour qu’il l’apprenne. Pour l’instant, il aime compter les bonbons c’est donc cela qui est au programme et tant pis si ce n’est pas ce qu’il est censé savoir faire à son âge !

Notre fils est aussi inscrit dans une activité collective et sans doute que l’année prochaine il ira au centre de loisirs. Il nous semble important et riche qu’il fréquente aussi d’autres enfants et d’autres adultes que son milieu familial.

Pour conclure, je dirais que c’est un choix qui se remet en question tous les ans et qu’il est fonction des envies et des besoins de notre fils, des nôtres, mais aussi de ce qui est possible dans notre environnement social et familial. Beaucoup de facteurs à prendre en compte donc et ce choix n’est pas simple à faire car il implique de pouvoir le « défendre » face aux multiples pressions sociales qui se veulent souvent normalisatrices en même temps que bien intentionnées.

Céline

 

L’école…

 

Lorsque nos enfants entrent à l’école, on a souvent l’impression de ne plus avoir notre mot à dire. D’ailleurs, certains s’entendent dire « faites-nous confiance, ne posez pas trop de questions ». il est vrai qu’on ne sait pas vraiment ce qui se passe dans la classe. Une visite de l’école ne suffit pas à comprendre ce qui va se passer toute la journée.

Je n’ai pas été habituée à confier mes enfants sans avoir au préalable « vérifié », ou du moins appris à connaître les personnes qui allaient s’en occuper. L’assistante maternelle a été reçue un long moment en entretien. A la crèche comme chez la nourrice, nous avons eu une période d’adaptation, en présence des parents… à l’école, on dépose ses enfants le jour de la rentrée, au mieux on reste 10/15mn chez les petits et puis basta, prière de sortir… dur dur !!!

Nous avons la chance dans l’école de nos enfants d’avoir une équipe enseignante très ouverte au dialogue avec les parents :

L’accueil de tous les élèves se fait dans les classes, ainsi que le retour le soir. Un par un pour les maternelles. Ce qui nous permet d’échanger facilement quelques mots avec l’instit matin et soir. De même un cahier de liaison est toujours présent dans le cartable et permet donc d’avoir pas mal d’infos sur ce qui se passe à l’école.

Dans les cahiers de vie, l’enseignante de mon fils utilise beaucoup les impressions de photos sur ce qui se passe dans la classe : les activités, les anniversaires… on voit réellement ce qui se fait.

Il faut aussi réussir à passer par-dessus certaines de nos appréhensions. Nous avons quelquefois de mauvais souvenirs d’école, qui refont surface quand nos enfants y vont. Comme pour le reste de l’accompagnement de nos enfants, je trouve qu’il faut faire la part des choses entre ce que l’on a vécu et ce que nos enfants vivent. Ce n’est pas la même situation/époque/personnes…

Notre fille aînée n’était pas très enthousiaste à l’idée d’aller à l’école : nouvelle commune, nouvelle maison, elle ne connaissait personne, et puis en plus, cette année, elle allait devoir aller à l’école toute la journée + cantine… la rentrée nous a stressées. J’avais mal de lui infliger ces contraintes, mal de devoir la laisser toute la journée dans un endroit avec des inconnus… et puis, finalement, elle s’est trouvée des amis, sa place, le lien avec son instit…

C’est elle qui m’a apportée son point de vue, que je vous transmets à mon tour : « tu sais, maman, au début, j’avais un peu peur, et puis je me suis un peu forcée pour y aller (vers les autres ), et après j’étais contente de l’avoir fait »… alors, voilà, oui, ça peut parfois être un peu dur, mais elle a appris cela : en faisant un effort, on peut aussi être fier de ce qu’on a fait…

De mon côté, je reste à l’écoute de ce qu’elle rapporte de l’école. Elle pose parfois des questions, est choquée par ce qu’elle perçoit de violence, de différence d’éducation. C’est l’occasion d’en parler, de voir que chacun fait différemment, de réaffirmer nos principes, nos façons de faire. De lier des amitiés aussi avec des personnes qu’elle n’aurait pas rencontré en dehors… ces amitiés à elle, pas induites par les fréquentations de ses parents.

Son petit frère, qui est en petite section, a lui décidé de séparer école et maison. On ne sait pas grand-chose de ce qui se passe à l’école. C’est son univers à lui, où il se construit indépendamment de ses parents, où il trouve d’autres références.. Et pour autant, il y est bien. J’en discute suffisamment avec son enseignante pour m’en assurer. Il est vrai qu’une journée d’école, c’est parfois long pour les petits. Nous avons fait le choix de ne pas imposer l’après-midi à nos enfants en petite et moyenne section. Certains jours, notre fils réclame donc à rester à la maison. Pas tous les jours… il apprend à exprimer ses envies, ses limites.

J’ai parfois l’impression d’être « envahissante », car je profite de chaque occasion pour discuter avec les enseignants, de leur classe, de leur point de vue sur l’école, de ce qui s’y passe avec mes enfants. Mais je me rends compte finalement que certains apprécient vraiment de pouvoir échanger ainsi avec des parents. Lorsque le dialogue s’engage dans une volonté mutuelle de progresser, d’échanger, la parole se fait souvent facilement. Il faut, je pense, faire attention à ne pas arriver dans une position de jugement. Et lorsque l’on se trouve face à des enseignants sur la défensive, leur faire comprendre que nous ne sommes pas là pour juger leur travail, remettre en cause leur pratique mais bien dans une volonté d’avancer ensemble pour le mieux-être de nos enfants…

Je crois de plus en plus qu’il ne faut pas hésiter à vouloir prendre sa place à l’école… les structures dans l’école publique permettent aux parents de s’investir, de donner leur opinion. Il existe de nombreux moyens de s’investir dans l’école : les rencontres avec les enseignants, les conseils d’école, les associations de parents d’élèves…

A nous de saisir ces places, et de suivre notre enfant, à distance, dans ce nouvel environnement…

Pauline